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Comment un planificateur financier réfléchit à un projet d’achat d’une première propriété?


Ma conjointe et moi somme présentement dans le processus de mettre des sous de côté pour acheter notre première propriété dans quelques années. Cette décision nous a mené à réfléchir grandement sur notre planification financière et au type de maison nous pourrions nous permettre dans le futur sans pour autant compromettre nos autres projets de vie.

En tant que planificateur financier, voici ce que j’ai considéré dans ma propre situation et ce que j’encourage les autres à prendre en compte si vous planifiez l’achat d’une maison dans les prochaines années.

 

1 – Réfléchissez à la manière dont votre mise de fonds s’intègre dans votre stratégie

Bien qu’il soit possible de verser moins de 20% de mise de fonds, je préfère ce montant de mise de fonds conventionnel. Cela permet de réduire le coût mensuel de votre prêt hypothécaire et d’éviter les frais supplémentaires comme l’assurance hypothécaire (SCHL).

Un acompte supérieur à 20 % peut aussi vous aider à obtenir un meilleur taux d’intérêt et diminuer vos paiements hypothécaires. Cependant, cela immobilise une grande partie de votre argent dans un actif illiquide. La valeur de votre maison pourrait ne pas augmenter aussi rapidement qu’un portefeuille d’investissement diversifié.

Personnellement, je suis dynamique dans mes investissements à long terme. Mon portefeuille est composé à 100 % d’actions, ce qui, selon moi, offre une espérance de rendement supérieure à la croissance d’une maison. C’est pourquoi je préfère ne pas dépasser 20 % de mise de fonds.

Avec une mise de fonds limitée, vous pouvez investir davantage dans un portefeuille d’investissement, ce qui diversifie davantage vos actifs et vous permet potentiellement de bonifier la croissance de votre patrimoine sur le long terme.

Si vous êtes du genre très conservateur dans vos investissements, alors peut être qu’une mise de fonds supérieure à 20% pourrait faire du sens pour vous.

 

2 – Le fameux CELIAPP : Profitez de vos avantage fiscaux

Avec l’arrivée du CELIAPP les futurs acheteurs ont désormais encore plus d’options pour accumuler des sommes pour l’achat d’une maison. Et personnellement… je compte bien en profiter au maximum!

Nous avons commencé à maximiser nos CELIAPP en 2023.

Pour maximiser le régime, il faut y cotiser 8 000$/an chacun pendant 5 ans. Nous avons fait nos calculs et le fait d’attendre à 2027 pour acheter est un Trade off que nous sommes absolument prêts à prendre.

Dans notre cas, reculer la date butoir d’acquisition est un trade off que nous somme prêt à prendre, mais il se peut que ce ne soit pas votre cas. Pas de panique, il y a tout de même des avantages fiscaux à n’attendre que 3 ou 4 ans, mais ceux-ci sont tout simplement moins volumineux.

En cotisant au CELIAPP, on combine les avantages du REER et du CELI. La cotisation donne une déduction d’impôt, les gains annuels ne sont pas imposables et au retrait, si on utilise l’argent pour acheter une maison admissible, on peut sortir les montants libres d’impôt.

Personnellement, j’estime que mes revenus vont considérablement augmenter et me faire changer de palier d’impôt en 2024 et les années suivantes, alors lorsque j’ai cotisé au CELIAPP en 2023, je n’ai pas pris ma déduction fiscale immédiatement. Je l’ai reporté pour me faire sauver encore plus d’impôt quand mes revenus seront plus élevés. Du côté de ma conjointe, la déduction a été prise durant l’année financière de cotisation puisqu’un changement de palliers d’impôt n’est pas envisagé dans un future proche.

En cotisant chacun au CELIAPP pendant 5 ans, nous aurons accumulé chacun 40 000$ et donc nous aurons accumulé chacun une déduction d’impôt de 40 000$. D’après mes calculs, pour moi, cette déduction me fera sauver environ 19 000$ en impôts. Pour ma conjointe, on parle d’une économie d’impôt d’environ 14 500$.

Puisqu’on projette acheter à moyen terme, notre capacité à prendre des risques est relativement basse. On sait qu’on va avoir besoin de cet argent d’ici les 5 prochaines années, donc on ne veut pas prendre trop de risque avec l’argent dédié à notre maison.

Ainsi, nous avons opté pour un portefeuille prudent-modéré (30% actions et 70% obligations moyen et court terme) pour cet objectif.

Deux ans avant l’achat, nous prendrons soins de sécuriser 100% des sommes que nous avons besoin pour les frais initiaux qui incluent principalement la mise de fonds, les frais de notaire, la taxe de bienvenu, les frais d’inspection et les frais de déménagement.

Avec ce profil d’investisseur, je projette un rendement conservateur de 3%/années. Sur 5 ans, cela représente un rendement libre d’impôt d’environ 3 700$ chacun.

En prenant soin d’inclure les gains fiscaux et le rendement, le gain total combiné de la stratégie pour moi et ma conjointe est d’environ 41 000$. Ça justifie largement notre décision d’attendre un minimum de 5 ans avant de devenir propriétaire.

 

3- Ne consacrez pas plus de 33% de votre revenu net aux dépenses de logement

Ensuite, tenez compte de vos coûts mensuels et annuels de propriété. Le conseil que je donne à mes clients en planification financière – et que je suis moi-même – est de maintenir les coûts annuels de logement à un maximum de 33% de la paie nette.

Tenez compte des éléments suivants pour déterminer le coût annuel de la propriété d’une maison ou d’un condo:

  • Capital et intérêts de votre prêt hypothécaire
  • Taxes foncières
  • Assurance habitation
  • Électricité et chauffage
  • Coût moyen d’entretien (j’assume normalement 1% de la valeur de la maison chaque année)

Si votre revenu net familial est de 100 000$, selon cette mesure, vous devriez viser à ne pas dépasser 33 000$ comme budget de logement pour l’année (Cela s’applique également à la location).

Gardez à l’esprit que cette mesure est une ligne directrice, pas nécessairement une règle absolue. J’aime 33% de la paie nette car cela signifie qu’on attribue seulement 1/3 du budget aux dépenses de logements, ce qui laisse beaucoup de marge de manœuvre dans votre budget pour l’épargne, les autres besoins essentiels et tout ce qui est important pour vous dans votre vie.

 

4 – Soyez ouvert à la location jusqu’à ce que votre situation financière se stabilise

Comme je l’ai dit, nous sommes présentement en train de planifier l’achat d’une première maison. Dans l’immédiat, nous sommes locataires et contrairement à la pensé populaire, c’est une décision très avantageuse financièrement pour nous.

Nous avons un beau 4 1/2 récent et très bien situé qui nous coûte un peu moins de 1 200$/mois. À titre de comparaison, si on voulait acheter une maison de 500 000$ avec 20% de mise de fonds, le paiement hypothécaire à lui seul serait d’environ 2 200$ et si on ajoute à ça tous les autres coûts de logement on serait probablement au-dessus de 3 000$/mois.

On dit souvent qu’être locataire c’est de tirer de l’argent au feu, mais on néglige le coût d’opportunité. Dans notre exemple, être locataire nous coûte environ 1 800$/mois de moins qu’être propriétaire. Cette différence, on ne la dépense pas. Plutôt, on l’épargne dans nos CELI, CELIAPP et REER. Ce faisant, le fait d’être locataire est bien plus avantageux pour nous sur le plan financier.

Toutefois, il n’y a pas juste les finances dans la vie. Il faut aussi penser au plan psychologique et émotionnel. Nous avons envie d’avoir notre chez nous avec une grande cour, une grande cuisine et un bureau chacun.

Mais, plutôt que de se précipiter sur une maison qu’on risque de garder pendant seulement 4-5 ans, nous avons décidé d’être patient. Quand on va acheter une maison, ce sera avec l’intention d’y rester très longtemps.

 

5 – Vous avez un fonds d’urgence correspondant à 3 à 6 mois de dépenses

En plus de la mise de fonds et des autres frais initiaux (notaire, déménagement, inspection, taxes de bienvenu, etc.), je conseil d’avoir un fonds d’urgence de côté en cas d’imprévus. Plus précisément je conseil d’avoir un bon 3 à 6 mois de dépenses de côté dans des placements sécuritaires comme un compte épargne à intérêts élevés.

De mon côté, puisque je suis travailleur autonome et que mes revenus sont variables, je vise plus pour un 6 mois. Ma conjointe est salariée avec un revenu et une situation d’emploi très stable. Alors, pour elle, nous jugeons que 3 mois est plus que suffisant.

Le fonds d’urgence est important. C’est votre première ligne de défense contre les dépenses imprévues. Avoir de la liquidité disponible de côté, ça vous permet d’éviter les mauvaises dettes et d’éviter de devoir toucher à vos autres investissements plus dynamiques en cas de besoin.

Quand on devient propriétaire, les chances de dépenses imprévues augmentent considérablement.

Autre chose à garder en tête, la plupart des assurances invalidité longue durée (collectives ou individuelles) ont un délai de carence qui tourne autour de 90 jours. En réalité, puisque les prestations sont versées en fin de mois, le délai de carence réel est de 120 jours. Ainsi, si vous êtes dans l’incapacité de travailler, votre assurance invalidité pourrait ne pas payer avant 4 mois! Vous devez quand même continuer à payer vos dépenses de logement pendant ces 4 mois…

 

6 – Vous avez des protections suffisantes en cas d’imprévus (maladies, invalidité, décès)

Avoir des protections suffisantes en cas de maladies, d’invalidité ou de décès est crucial pour protéger votre style de vie, votre famille et vos actifs.

De mon côté, je suis travailleur autonome, mais le cabinet auquel je suis rattaché offre un plan de protection collectif. Ma conjointe a également un plan offert par son employeur.

Nous avons évalué les options et nous sommes venu à la conclusion que l’assurance santé et dentaire est meilleure du côté à ma conjointe, alors j’ai embarqué sur son collectif plutôt que le mien.

Toutefois, au niveau de l’assurance invalidité ça ne suit pas. Je dois moi-même m’assurer d’être correct de mon côté. J’ai pris l’option de base offerte par mon employeur puisqu’elle est obligatoire. Je préfère la flexibilité d’un plan de protection individuel que je peux personnaliser selon mes propres besoins plutôt que celui de mon groupe.

Mon objectif et ce que je recommande à la plupart de mes clients est de s’assurer pour le maximum assurable en invalidité. Les assureurs ne vont jamais accepter de couvrir 100% des revenus. Il y a un maximum toutes sources confondues qu’il faut respecter.

Ceci étant dit, j’ai souscrit une protection individuelle pour combler l’écart entre le maximum assurable selon mes revenus et ce que mon collectif m’offre déjà. Puisque je sais que mes revenus vont augmenter dans le futur, j’ai prévu un avenant qui me permet d’augmenter ma protection à chacun des anniversaires de ma police. Nous avons fait la même chose pour ma conjointe.

Au niveau de l’assurance vie, nos besoins dans l’immédiat sont presque nuls, mais nous tenons à garantir notre assurabilité immédiatement pendant qu’on est encore jeune et en santé. Nous savons qu’au minimum on aimerait couvrir l’hypothèque et notre style de vie pendant quelques années si l’un de nous venait à décéder. Nous ne prévoyons pas avoir d’enfants, ce qui diminue considérablement nos besoins. Nous avons donc décider de prendre chacun une protection temporaire de 10 ans de 1 000 000$. Nous réviserons nos besoins périodiquement ou lorsque des événements importants se produiront.

Avec le plan de protection mis en place et notre fonds d’urgence, nous sommes confiants que peu importe ce qui arrive, notre situation financière sera résiliente et nos projets futurs ne seront pas en péril.

 

7 – Vos documents légaux sont en ordre

Autre aspect très important, mais souvent négligé, c’est de s’assurer que vos documents légaux comme le testament et le mandat de protection sont à jour et en ordre. Ces documents garantissent que vos biens seront gérés conformément à vos souhaits en cas d’incapacité ou de décès.

C’est particulièrement important pour les conjoints de fait. Pourquoi? Au Québec, en l’absence de testament, les conjoints de fait, contrairement aux couples mariés, n’ont aucuns droits dans la succession de leur partenaire décédé. Sans testament, la totalité du patrimoine du défunt, incluant sa part de la maison, risque de se retrouver dans les mains des enfants, des parents ou autre.

Produire une convention de vie commune peut également être une excellente idée pour éviter les conflits liés à la division des biens en cas de séparation. Le temps pour prévoir ça, c’est pendant que votre couple va bien!

Et, soi-disant passant, assurez-vous dont que votre couple est solide avant d’acheter une maison ensemble!

Si vous anticipez avoir des enfants après le 30 juin 2025, pensez aussi au nouveau régime d’union parentale qui prendra effet à ce moment. Ce nouveau régime créera un patrimoine commun un peu comme le patrimoine familial du mariage, mais à quelques différences prêts. Contrairement au mariage, vous aurez l’opportunité de vous retirer n’importe quand du régime par acte notarié avec l’accord des deux conjoints. Donc bref, si vous fondez une famille après le 30 juin 2025, allez voir un notaire afin de bien comprendre les implications de l’union parental!

De mon côté, je suis un peu un cordonnier mal chaussé… Mon testament n’est pas encore fait… Mais ça s’en vient! Du moins c’est ce que je n’arrête pas de me dire… À suivre…

 

7 exigences pour qu’un projet immobilier tienne la route

Pour conclure et résumé ce qui a été discuté précédemment, voici 7 exigences pour qu’un projet immobilier tienne la route :

  • Mise de fonds d’au moins 20%
  • Les dépenses futures de logement ne devraient pas dépasser 33% de vos revenus nets
  • Votre couple est solide et durable
  • Votre budget est bien équilibré et comprend des surplus chaque mois
  • Vous avez un fonds d’urgence correspondant à 3 à 6 mois de dépenses
  • Vous avez des protections suffisantes en cas d’imprévus (maladies, invalidité, décès)
  • Vos documents légaux sont en ordre (testament et mandat)
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Kristopher Lepage

Planificateur financier à IG Gestion de patrimoine. Je me spécialise en planification de la retraite. J’écris également des articles hebdomadaires sur le sujet.


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